Handicap invisible : comment mieux accompagner ce qui ne se voit pas ?

Si je vous dis “handicap”, je prends le pari que la première image qui vous vient à l’esprit est celle d’une personne en fauteuil roulant.

Pourtant, 80% des handicaps sont invisibles. Vous croisez chaque jour des personnes concernées (diabétiques, dyslexiques, bipolaires, …) sans même le savoir. Ces situations sont souvent ignorées au travail, et parfois même dissimulées volontairement pour ne pas faire de vague ou être discriminé en entreprise.

Entre méconnaissance et préjugés, les entreprises ont encore des progrès à faire sur l’inclusion et la sensibilisation des salariés. Au menu de cette édition :

  • Les différentes formes de handicap invisible 
  • Pourquoi cacher son handicap invisible, ou du moins ne pas en parler ?
  • Que peuvent faire les employeurs (équipes RH et managers) pour mieux les accompagner ?

Comprendre ce que cache le terme de “handicap invisible”

Votre collègue de travail vous semble en pleine forme, vous ne comprenez pas pourquoi il a fait une demande de reconnaissance de travailleur handicapé.

Dans l’imaginaire collectif, le mot handicap est encore associé au handicap physique et souvent assimilé au fauteuil roulant. Pourtant, seules 2% des personnes en situation de handicap sont en fauteuil roulant.

Le handicap invisible est insidieux, complexe, pluriel. Derrière ce terme, se cache une liste exhaustive de symptômes et de maladies que nous pouvons regrouper en 5 grandes familles :

  • Les troubles visuels et auditifs : malvoyance, malentendance, acouphènes, problème de vision chromatique. 
  • Les maladies chroniques, invalidantes ou auto-immunes : maladie de Crohn, cancers, diabète, sclérose en plaques, endométriose. 
  • Les troubles moteurs : mal de dos, sciatique, tms. 
  • Les troubles cognitifs : troubles DYS (dyslexie, dyspraxie), le TDAH, autisme. 
  • Les troubles psychologiques et psychiatriques : dépression, bipolarité, trouble anxieux, schizophrénie, et tous les troubles issus de séquelles post cancer, AVC, traumatisme, violences sexuelles ou conjugales.

Son aspect multiforme complique la tâche des entreprises pour les identifier, les répertorier et proposer les éventuels aménagements de poste. À cela s’ajoute le fait que certaines personnes concernées n’osent pas en parler par peur du jugement, d’être discriminées ou car elles refusent l’étiquette “handicap”.

Pourquoi certains préfèrent cacher leur handicap (invisible)

Le handicap, qu’il soit visible ou invisible, reste le premier motif de discrimination en matière d’emploi. Les personnes reconnues en situation de handicap se trouvant au chômage sont surreprésentées par rapport au reste de la population active.

Selon un baromètre Agefiph-IFOP sur la perception de l’emploi des personnes en situation de handicap, paru en décembre 2022, 61% des personnes interrogées déclarent qu’elles n’ont pas mentionné leur handicap sur leur CV de peur que cela ne leur soit préjudiciable.

Les personnes concernées n’osent pas se déclarer au travail parce qu’elles ont peur d’être discriminées. Mais comme elles ne se déclarent pas, elles ne peuvent pas demander d’aménagements de poste. Elles travaillent donc dans des conditions qui ne sont pas optimales, et c’est la double peine pour elles.

Alors que peut faire l’entreprise pour aider ces salariés en situation de handicap, qui ne veulent pas eux-mêmes qu’on les aide ?

Que peut faire l’entreprise pour mieux les accompagner ?

Les premiers concernés n’en parlent pas eux-mêmes, alors faut-il vraiment chercher à les aider ?

Les conséquences pour les personnes en situation de handicap invisible sont importantes (même si le handicap semble mineur) :

  • Absentéisme, arrêts de travail, 
  • Pas de perspective d’évolution, 
  • Risque de surmenage, de fatigue, 
  • Risque d’accident du travail et/ou de maladie professionnelle

Mais les impacts sur l’entreprise également :

  • Désorganisation du travail en équipe, 
  • Baisse de la qualité et de la productivité, 
  • Dégradation du climat social, 
  • Baisse de la performance individuelle et collective.

Axe 1 : détecter les signaux faibles

Si le handicap ne se voit pas, certains signaux ne trompent pas :

  • Absentéisme répété 
  • Tensions avec l’équipe 
  • Travail rendu en retard
  • Erreurs de compréhension

Attention aux boulettes !

Un absentéisme répété n’est pas forcément le signe d’un handicap invisible. Il est important de s'interroger, surtout si les absences se répètent de manière inhabituelle. Le salarié fait peut-être face à une difficulté personnelle ponctuelle. En revanche, on n’arrive pas la bouche en cœur un matin en disant “dis-donc tu n’aurais pas un handicap invisible ? “. On ne lui demande pas non plus comme notre nouveau Ministre du travail “T’es autiste ou sourd ?”

Axe 2 : former vos managers

Le manager de proximité a un rôle clé pour détecter et faire remonter les informations aux équipes RH ou à ses supérieurs hiérarchiques.

Formez vos managers à repérer ces signaux, à engager la conversation avec leurs équipes et surtout à entretenir un climat de confiance pour que les personnes concernées se sentent libres d’en parler.

La formation permet également de donner des clés à un manager pour l’aider à formuler correctement sa demande auprès d’un salarié. Comme dit de manière humoristique plus haut, vous ne pouvez pas arriver un matin et demander à quelqu’un “s’il est handicapé”.

Axe 3 : communiquer et sensibiliser

Et si c’était vous qui commenciez à évoquer le sujet ? Ils n’en parlent pas, d’accord, mais vous, vous pouvez le faire !

La sensibilisation des équipes est un levier incontournable d’une politique handicap engagée. Lorsqu’un employeur montre son ouverture au sujet du handicap, qu’il soit visible ou invisible, il se donne plus de chances que les collaborateurs concernés en parlent.

Des évènements tels que Octobre Rose ou la SEEPH (Semaine du Handicap) sont des occasions d’aborder ces sujets sans tabou, sous un angle bienveillant voire avec humour. 

Sensibiliser l’ensemble des équipes permet aussi de développer la vigilance des collègues, de dépasser les incompréhensions et les préjugés. Ce sont des petites graines que vous semez pour amener les premiers concernés à en parler.

En revanche, mener une politique handicap engagée pour favoriser l’inclusion des personnes concernées ne se résume pas à porter un tee-shirt rose en octobre. C’est un travail de longue haleine, qui implique de prendre des engagements à travers une charte, un plan d’action voire un accord d’entreprise (éventuellement agréé).

Axe 4 : agir !

Vous ne pouvez pas inciter les personnes à reconnaître leur handicap (voire à réaliser une RQTH pour augmenter votre pourcentage…) et les laisser tomber ensuite. Il faut donner des preuves de votre implication sur le sujet, et pas seulement faire des promesses.

Quelques actions à mener :

  • Nommer un référent handicap et lui donner les moyens d'agir
  • Travailler de concert avec la médecine du travail et l'ensemble des professionnels tels que les ergonomes, psychologues du travail, ...
  • Piloter les demandes d'aménagement de poste : recenser, étudier conjointement, valider, communiquer
  • Adapter les plannings pour les rendez-vous médicaux et administratifs
  • Apporter un soutien à la constitution des dossiers administratifs
  • ...

Vous pouvez commencer par des actions simples sur des aménagements de poste (fauteuils ergonomiques, bureaux assis-debout, casques audio adaptés, logiciels de dictée) ou d’espaces dédiés (ex : salle de sieste, espace propre et isolé pour les diabétiques, etc.).

Une politique handicap, ce sont parfois des petites actions, mais toujours de grandes responsabilités.

Pour aller plus loin

Je vous invite à découvrir le Média Petite Mu un site qui apporte un nouveau regard sur le handicap, avec de la spontanéité, de l'authenticité et de l’humour.

Pour travailler avec moi

Je vous invite à découvrir ma formation en ligne, réalisée en collaboration avec l’Académie RH “Handicap et Emploi : maîtrisez vos obligations”

Rendez-vous dans la rubrique Handicap de mon site internet !

Rédaction : Corinne Lusetti-Roger - Partenaire RH - C’RRH